AFC2018

Du 10/07/2018 au 13/07/2018

Domaine de Rockefeller - 8 Avenue Rockefeller, 69008 Lyon, FRANCE


Conférence Grand Public - Jeudi 12 juillet 2018 à 18h30

Faculté de Médecine – Université Claude Bernard Lyon 1 - Campus Rockefeller - Amphithéâtre B – Bâtiment JF CIER
8, avenue Rockefeller, 69008 Lyon

L’univers en expansion des virus géants. Chantal ABERGEL


Institut de Microbiologie de la Méditerranée, Marseille
La découverte des virus géants, visibles au microscope optique, a révolutionné le monde de la virologie en obligeant à redéfinir la notion de "Virus". Nous allons présenter les questions et réflexions posées au travers de la caractérisation des 4 familles connues à ce jour, les Mimiviridae, les Pandoraviridae, Pithovirus et Mollivirus sibericum isolés à partir d’échantillons de pergélisol Sibérien vieux de plus de 30000 ans.

Depuis leur découverte au milieu du XIXème siècle, on a toujours considéré que les virus n’étaient pas retenus par le filtre conçu par Chamberland pour isoler les microbes. C’est en 2003 que la découverte du premier virus géant, Mimivirus, a démontré l’existence de virus visibles au microscope optique, possédant un génome à ADN comparable en complexité à celui des bactéries. Depuis, d’autres virus géants ont été isolés démontrant qu’ils ne sont pas rares mais ont bien été occultés pour des raisons historiques. Alors que l’on commençait à proposer une théorie sur l’origine et l’évolution des virus à ADN, a surgi la découverte d’une nouvelle famille de virus géants, les Pandoravirus. Ces virus, différents par leur morphologie, présentent des génomes de complexité comparable aux plus petites cellules eucaryotes. Plus de 90% des protéines codées par leurs génomes ne ressemblent à rien de connu, suggérant qu’ils pourraient avoir une origine différente des autres virus.


Images colorisées de microscopie électronique obtenues sur des sections ultrafines de Megavirus chilensis (diamètre : 0,7 µm), Pandoravirus salinus (1x0,5µm), Pithovirus sibericum (1,2x0,5µm) et Mollivirus sibericum (diamètre : 0.6 µm).
(Copyright : IGS, CNRS-AMU)


C’est finalement en prospectant le pergélisol que nous avons réactivé deux virus géants de plus de 30.000 ans, Pithovirus sibericum, qui bien que partageant la morphologie des Pandoravirus, correspond à une troisième famille de virus, enfin Mollivirus sibericum, de morphologie sphérique et premier membre de la quatrième famille de virus géants. La découverte de 3 nouvelles familles en seulement 3 ans démontre que nous sommes loin d’avoir prospecté la biodiversité virale. Une des surprises apportée par l’analyse des génomes de chacune des nouvelles familles de virus géants a été le nombre de gènes unique à chacune des familles, également absents des bases de données de séquences. On ne peut rien dire de plus du tiers de leurs gènes bien qu’ils soient tous exprimés ils codent donc pour des protéines totalement originales. Cette observation soulève la question de l’origine des virus géants et de leur mode d’évolution. De nombreuses surprises pourraient surgir de l’étude de ces géants et permettre d’élucider le rôle qu’ils ont pu jouer dans l’apparition de la vie sur terre.



Chantal Abergel

Après son doctorat en Sciences des Matériaux, elle passe 5 ans aux National Institutes of Health, aux États-Unis. A son retour en France, en 1995, elle devient Ingénieur de recherche au CNRS et fonde, avec Jean-Michel Claverie, le Laboratoire « Information Génomique et Structurale », premier laboratoire français combinant bio-informatique et biologie expérimentale. Elle est promue Directeur de recherche en 2004 et codirige le laboratoire depuis 2010.
Depuis la découverte du premier virus géant, Mimivirus, le laboratoire s'est consacré à la recherche et à la caractérisation de nouveaux virus géants environnementaux. Il existe à ce jour quatre familles de virus géants possédant chacune ses propres spécificités. Les premiers membres des Molliviridae et des Pithoviridae ont été isolés à partir d'échantillons de Pergélisol vieux de plus de 30.000 ans. Les Pandoraviridae possèdent les plus gros génomes avec des milliers de gènes ne ressemblant à rien de connu ni dans le monde cellulaire ni dans le reste du monde viral. Ces découvertes remettent en question la notion même de virus, questionne sur l'origine de ces différentes familles de virus, leur évolution et le rôle qu'ils ont pu jouer dans l'apparition de la vie sur terre.